Un manifeste fédère les paysagistes autour de la transition écologique

Un article du Moniteur à l'occasion du séminaire des paysagistes-conseils à Grenoble en lien avec le manifeste a été publié le 14 septembre 2020. 

 

Un manifeste fédère les paysagistes autour de la transition écologique

Laurent Miguet |  le 14/09/2020  |  Grenoble,  France ,  Transition écologique

Ma newsletter personnalisée Le « manifeste pour une transition écologique et solidaire par le projet de paysage » ne pouvait trouver meilleure rampe de lancement : l’association des paysagistes conseil de l’Etat (APCE)  a profité de son séminaire annuel, réuni du 9 au 12 septembre à Grenoble, pour présenter cette feuille de route destinée à toute la communauté professionnelle du paysage.

« Tout changer en 10 ans » : le mot d’ordre de Yann Mongaburu a fait mouche, le 10 septembre au cours de la visite de Grenoble à vélo par les paysagistes conseil de l’Etat.

L’urgence climatique justifie la formule de l’élu grenoblois délégué à l’urbanisme provisoire: la ville enregistre une augmentation de la température moyenne de 2°C depuis le début des années 60, soit le seuil que la communauté internationale s’interdit de dépasser d’ici à 2050. Réunis en séminaire annuel sur le thème de l’urgence climatique, les paysagistes conseil de l’Etat ont reçu le message cinq sur cinq.

Unité

La présidente sortante Alice Brauns et son successeur Vincent Tricaud ont rebondi sur ce contexte local pour sortir de leur réserve à travers un texte militant, cosigné par les deux autres associations de la profession : la Fédération française du paysage (FFP) et la branche européenne de la Fédération internationale des architectes paysagistes (Ifla Europe).

Les signataires ont obtenu le soutien du collectif des paysages de l’après pétrole (Pap), association créée en 2015 pour réaliser la transition énergétique et énergétique à travers le paysage : « Montrons que ça marche, qu’on y croit et qu’il faut faire vite !», s’est exclamée sa présidente Odile Marcel, le 10 septembre lors de la présentation du manifeste. Des discussions en cours visent à associer le réseau des écoles de paysage à la diffusion et à la mise en œuvre d’initiatives pédagogiques en phase avec le contenu du manifeste.

Electrochoc

Trois axes structurent le document : constat scientifique du changement climatique, affirmation de l’efficacité du projet de paysage pour en réduire les effets, et engagement des professionnels à y contribuer. « Nous considérons le projet de paysage comme le bon outil pour raccrocher des paramètres éloignés dans une action concrète, sur un espace donné », résume Alice Brauns.

Principaux destinataires, l’Etat et les collectivités répondront-ils à l’élan de la profession ? Le séminaire de Grenoble n’a pas levé les doutes, après l’électrochoc inaugural déclenché par l’astrophysicien Aurélien Barrau : « On parle d’accélérer la transition, alors qu’elle n’a pas commencé, et que chaque année apporte un bilan pire que la précédente ». Face au désastre et faute de solution, le scientifique prône la poésie et la radicalité.

Persévérance

Les paysagistes conseil applaudissent et ajoutent la persévérance : après avoir tenu leur séminaire annuel en dépit de la pandémie, ils entendent maintenir la pression. Leur assemblée générale du 21 octobre devrait confirmer leur volonté d’investir « les zones de frottement entre l’Etat et les collectivités » énumérées par le président Vincent Tricaud : biodiversité, risques naturels, zones sans traitement phytosanitaire, zéro artificialisation nette... « Sur tous ces sujets, nous pouvons transformer les injonctions et contraintes en moteurs de projets », insiste le président des paysagistes conseil.

Mais l’enthousiasme nourri par la pratique du projet de paysage ne suffit pas à balayer l’impatience, voire le désarroi. Thème d’un des quatre ateliers thématiques du séminaire, l’agriculture et la forêt, qui couvrent 80 % du territoire, alimentent les frustrations : alors que la mise à la disposition d’une paysagiste conseil à la direction régionale de l’Agriculture et de la Forêt de Nouvelle-Aquitaine a ouvert des perspectives nouvelles en Charente-Maritime, l’Etat n’a tiré pour l’heure aucune conclusion de cette expérimentation prometteuse, pour retisser les liens entre villes et campagnes.

Inertie

Parmi les verrous à lever, Vincent Tricaud identifie « le manque de paysagistes dans la maîtrise d’ouvrage, qu’il s’agisse de l’Etat ou des collectivités ». Avant la crise sanitaire, la ministre de la Cohésion des territoires s’était déclarée favorable à l’ouverture de l’accès des paysagistes au concours d’ingénieur territorial. L’association ne manquera pas de relancer ce dossier significatif de l’inertie administrative rencontrée par la profession : avant Jacqueline Gouraud, d’autres ministres ont déjà exprimé des positions de principe dans le même sens.

L’éclairage des maîtres d’ouvrage devrait également reposer sur le guide de la commande publique paysagère promis par la mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques et élaboré avec l’APCE : une publication annoncée comme imminente depuis plusieurs années….